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Au fil des questions au programme d'histoire-géographie des classes de lycée. Des commentaires, exercices, rappels, ...

mardi 31 mai 2011

De Gaulle et les partis politiques (1)

L'opposition du général de Gaulle au "régime des partis", est connue. Les partis politiques sont des formations destinées à conquérir le pouvoir dont le général de Gaulle ne remet pas en cause l'existence. Ils participent naturellement au jeu politique dans les démocraties : 
"En démocratie, rien n'est plus naturel que l'existence des partis. Ils expriment nos oppositions réciproques", dit-il lors d'une conférence de presse (conférence du 24 avril 1947 qui suit le lancement du RPF).
D'ailleurs le texte de la constitution de 1958 sera le premier texte constitutionnel à reconnaître explicitement le rôle des partis, comblant ainsi un vide juridique. Mais, pour de Gaulle ( et c'est la pratique qu'il a cherché à imposer entre 1958 et 1969), le rôle qui leur est reconnu est clairement défini : le parti politique doit pouvoir jouer pleinement un rôle électoral (faire connaître les idées, les défendre par le biais des élections, disposer de représentants élus qui porteront - au sein de groupes parlementaires - les idées de la formation partisane...). Par contre, il ne doit avoir aucun rôle au niveau gouvernemental. Cela signifie que le gouvernement - qui dirige la politique du pays - ne doit pas dépendre d'une ou plusieurs formations partisanes, qui seraient à l'origine de la nomination de son chef, discuteraient sa composition, négocieraient leur soutien... En somme, ce que de Gaulle refuse, c'est ce qu'il appelle, sous l'appellation "régime des partis", la mainmise des organisations partisanes sur le gouvernement. 
"Varices", affiche de Sennep, 1946
Le dessin de Jean Sennep intitulé "Varices" livre un regard amusé sur la situation délicate du grand Charles, chef de gouvernement du GRPF, confronté à l'automne 1945 à une Assemblée Nationale dans laquelle les partis ont repris toute leur place. Trois partis - représentés ici comme des varices (ou des sangsues!) qui courent le long du mollet de de Gaulle - dominent l'assemblée constituante élue lors de ces premières élections d'après-guerre : le PC (parti communiste français, né en 1920, alors auréolé de son image de "parti des fusillés"); la SFIO (Section française de l'internationale ouvrière, née en 1905) ; le MRP enfin (Mouvement républicain populaire), jeune formation issue de la Résistance portant un courant démocrate-chrétien. 
Le dessin dit la gêne occasionnée à de Gaulle par le retour en force des partis. C'est d'ailleurs un de Gaulle débarrassé des habits du Général qui affronte - en civil - les désagréments politiques... La disproportion entre de Gaulle - filiforme et immense - et les partis - vers de terre capricieux - signale le parti-pris du caricaturiste : dessinateur de droite sous la 3e République, Sennep s'est  rallié en 1941 à la France Libre et il est un partisan indéfectible du Général. 
Pour en savoir plus sur le caricaturiste Sennep, voir le site suivant qui présente les dessins de ce caricaturiste célèbre sous la 3e puis sous la 4e république. 
De cet affrontement, de Gaulle sort perdant. Il ne parvient en effet pas à imposer sa conception d'un gouvernement " qui gouverne" à des partis politiques qui conçoivent le gouvernement comme une fédération de représentants des partis... De Gaulle fait donc le choix de la démission le 20 janvier 1946:
"Le 19 janvier, je fis convoquer les ministres pour le lendemain, rue Saint-Dominique. A l'exception d'Auriol et de Bidault, qui se trouvaient alors à Londres, et de Soustelle, en tournée au Gabon, tous étaient réunis, le dimanche 20 au matin, dans la salle dite "des armures". J'entrai, serrai les mains, et, sans que personne ne s'assit, prononçai ces quelques paroles : "le régime exclusif des partis a reparu, je le réprouve. Mais, à moins d'établir une dictature dont je ne veux pas et qui, sans doute, tournerait mal, je n'ai pas les moyens d'empêcher cette expérience. Il me faut donc me retirer".
Charles de Gaulle, Mémoires de Guerre, Le Salut, 1944-1946, Plon, 1959.  
Sources :
http://wodka.over-blog.com/article-2738784.html

dimanche 29 mai 2011

De Gaulle et le Rassemblement du peuple français (RPF)


Le général de Gaulle fonde en avril 1947 un rassemblement politique, le Rassemblement du Peuple Français (RPF), qui rencontre un succès électoral rapide.
  • Pourquoi rassembler le peuple français?



La décision de créer le Rassemblement du Peuple français fait suite aux désillusions de l'année 1946. Chef du gouvernement provisoire de la République française (GPRF), le général de Gaulle avait  été conforté dans cette fonction par l'Assemblée constituante élue en octobre-novembre 1945. Mais entre les partis qui forment l'assemblée - le Parti communiste, la SFIO (Section Française de l'Internationale Ouvrière), et le Mouvement Républicain Populaire (MRP) - et le général de Gaulle, il y a opposition sur ce que doivent être les institutions de la future république. Pour les premiers, attachés à la tradition républicaine française, l'essentiel doit résider entre les mains du Parlement : le pouvoir législatif (celui qui fait la loi) doit être le plus fort. Pour de Gaulle, à l'inverse, c'est à l'exécutif - et donc au Chef de l'Etat - que doit revenir l'essentiel du pouvoir. Sans un Parlement qui a voté les pleins pouvoirs à Vichy, il n'y aurait pas eu Vichy. Et, toujours selon de Gaulle, un Etat fort aurait pu empêcher la défaite de 1940... 
"Veut-on un gouvernement qui gouverne ou bien veut-on une Assemblée omnipotente déléguant un Gouvernement pour accomplir ses volontés (...) La formule qui s'impose, à mon avis, après toutes les expériences que nous avons faites, c'est un Gouvernement qui ait et qui porte seul - je dis : seul - la responsabilité entière du pouvoir exécutif.
 De Gaulle, Deuxième déclaration à l'Assemblée Constituante, 31 décembre-1er janvier 1946. 
 Quelles que soient ses convictions, comme la confiance que  continuent à lui porter les partis issus de la Résistance ( comme le MRP ) ou ceux qui s'en réclament ( le Parti communiste, et dans une moindre mesure, la SFIO), le général de Gaulle n'est alors que le Chef d'un gouvernement provisoire. Face à lui, l'Assemblée constituante est reine (les Français lui ont confié le devoir de faire la constitution). Impuissant à imposer ses vues, de Gaulle fait le choix de la démission le 20 janvier 1946. 
Le 19 janvier, je fis convoquer les ministres pour le lendemain, rue Saint Dominique. (...) tous étaient réunis le dimanche 20 au matin dans la salle dite "des armures". J'entrai, serrai les mains et, sans que personne s'assit, prononçai ces quelques paroles : "Le régime exclusif des partis a reparu. Je le réprouve. Mais, à moins d'établir par la force une dictature dont je ne veux pas et qui, sans doute, tournerait mal, je n'ai pas les moyens d'empêcher cette expérience. Il me fait donc me retirer". ( Charles de Gaulle, Mémoires de Guerre, Le Salut, 1944-1946, Plon, 1959). 

Après un temps de silence, le Général prend la parole à Bayeux, le 16 juin 1946 (le premier projet de Constitution, porté par le Pari communiste, a alors essuyé un vote négatif des Français et l'heure est à la formulation d'un nouveau projet. De Gaulle peut donc espérer faire entendre ses conceptions). Dans son discours, il expose un véritable projet constitutionnel avec un exécutif fort, une séparation claire des pouvoirs, germe de ce que sera la Constitution de la Ve République. 
Rien n'y fait... 
Le nouveau projet constitutionnel adopté par l'Assemblée constituante a peu à voir avec les idées défendues par de Gaulle : ce projet envisage en effet un régime dans lequel le législatif, détenu essentiellement par l'Assemblée nationale, aura un rôle majeur. De Gaulle ne désarme pas, il reprend ses idées à Bar-le-Duc, puis à Epinal, espérant obtenir le rejet, par les Français, du projet établi par la Constituante. Mais il n'est pas écouté, puisque le projet emporte l'adhésion des électeurs lors du référendum du 13 octobre 1946. Les institutions de la IVe République sont nées. 
  • Comment rassembler le peuple français?
Dès lors, de Gaulle est dans l'opposition.
Le 14 avril 1947, il lance un mouvement, le Rassemblement du peuple français, dont il souhaite qu'il ne soit pas un parti - ce qui est logique de la part de celui qui dénonce la mainmise des partis sur la vie politique - mais un mouvement, un rassemblement. Il s'agit de regrouper les Français qui se retrouvent sur ses positions, quelle que soit leur appartenance politique. Ce qui signifie en clair que de Gaulle propose la double appartenance : peuvent adhérer au RPF les membres de tous les autres partis politiques ( à l'exception des membres du Parti communiste). L'objectif est simple : par ce rassemblement, par son poids, par la diffusion des idées gaullistes, il faut obtenir le blocage du système parlementaire, et donc la révision constitutionnelle. 
Au dessus des partis... le RPF est d'abord le rassemblement autour de l'homme du 18 juin, de celui qui a permis la renaissance nationale. En témoignent les affiches de propagande du RPF. Aux symboles nationaux - le drapeau, les couleurs nationales -, aux symboles républicains (le bonnet phrygien, la cocarde, Marianne -ici la Marianne du bas-relief de l'Arc de Triomphe), sont mêlés ceux qui rappellent explicitement l'expérience du combat de la France Libre : la Croix de Lorraine, mais aussi les habits du général. L'homme providentiel - de Gaulle - n'est pas même nommé sur certaines affiches, sa figure suffisant à dire la portée de son combat. L'urgence du rassemblement par contre est mise en avant : " Pour en sortir", "Pour le Salut Public"... 
Le message est clair : la France est à nouveau menacée, la Patrie est en danger... Elle est en danger du fait de ses institutions ( il faut en sortir...), lesquelles ne lui permettent pas d'affronter les dangers de l'heure, parmi lesquels le principal est le danger communiste (qui n'apparaît pas sur les affiches). Nous sommes au printemps 1947 et le monde rentre dans la Guerre froide. 
Pendant cette période, chef politique, le général de Gaulle est interdit d'antenne. Il est donc obligé de se déplacer dans toute la France, de Bruneval à Strasbourg, pour faire connaître ses idées. Les armes du RPF sont donc essentiellement les discours prononcés par de Gaulle et les affiches, qui portent le message du RPF et signalent son succès. 
Affiche du RPF, 1947



  • Pour quel résultat? 
Le RPF rencontre immédiatement un succès conséquent. Sa progression, vantée par cette affiche de propagande, est remarquable. Aux élections municipales de l'automne 1947, le RPF rencontre un véritable triomphe dans les villes : treize sur les vingt-cinq plus grandes mairies françaises (Paris, Lille, Marseille, Strasbourg...) sont gagnées par le mouvement. De Gaulle souhaite que le gouvernement prenne acte de ce succès et fasse organiser de nouvelles élections, pour pouvoir mettre en oeuvre son projet constitutionnel. Devant le refus du gouvernement, il est obligé d'attendre les prochaines échéances électorales : les législatives de 1951. 
Pour contrer la double menace qui pèse sur le régime ( menace gaulliste + menace communiste ), le pouvoir instaure un nouveau scrutin qui permet aux formations politiques de se regrouper (si leur regroupement obtient la majorité des voix, alors il emporte la totalité des sièges; c'est le système dit des apparentements, dont l'objectif est de pénaliser les gaullistes et les communistes qui, en aucun cas, ne s'allieront avec une autre formation politique!). Le résultat est mitigé, puisque l'assemblée qui sort des urnes est composée de six formations, et donc presque ingouvernable. Pour le RPF aussi, le résultat est mitigé : le rassemblement gaulliste remporte certes un net succès, avec 121 élus. Mais ce n'est pas suffisant pour abattre le régime. Et les députés gaullistes se retrouvent, de fait, obligés de composer avec le "système" dénoncé par de Gaulle. La consigne d'abstention qui leur est donnée n'est pas toujours suivie. En 1953, le général de Gaulle décide de dissoudre le groupe parlementaire RPF. Les députés gaullistes continuent à siéger, désormais libres de participer au jeu parlementaire, voire de rentrer dans des gouvernements (Par exemple, Jacques Chaban-Delmas rentre dans le gouvernement Mendès-France en 1954). Pour de Gaulle, commence la "traversée du désert". 
Si elle n'est pas parvenue à bloquer le régime et à infléchir les institutions, l'expérience RPF a au moins deux réussites à son actif. D'une part, elle a mobilisé des militants et forgé un encadrement, qui se révélera important et efficace en 1958. D'autre part, elle a fait connaître les thèmes de campagne majeurs du gaullisme : menace communiste, domination des blocs, nécessité d'un Etat fort pour garantir l'indépendance de la France dans le contexte de Guerre froide. Elle a donc contribué à préparer l'opinion à l'éventualité d'un retour du Général sur la scène politique française. 

Sources : 
Site de la Fondation Charles de Gaulle : http://www.charles-de-gaulle.org/pages/l-homme/accueil/biographie/1946-1953-le-rassemblement-du-peuple-francais.php
Serge Berstein, Le gaullisme, un courant politique à l'épreuve de l'Histoire, La Documentation photographique n° 8050, 2006.
Article RPF dans le Dictionnaire De Gaulle, Robert Laffont, 2006.

L'Allemagne et son passé nazi


Ordnung und Vernichtung  (Ordre et extermination), 

A Berlin, une exposition intitulée "Ordre et extermination" est consacrée au rôle de la police allemande. Elle témoigne non seulement de l'avancée des connaissances historiques relatives au IIIe Reich et aux instruments de la terreur, mais aussi de la volonté des Allemands d'affronter leur passé. 
L’exposition berlinoise porte sur le rôle de la police sous le IIIe Reich, bras armé du régime en Allemagne même, mais aussi et surtout exécutante de la « solution finale » en Europe centrale et orientale. Des biographies de suiveurs mais aussi d’objecteurs montrent qu’il était tout à fait possible de « résister ». Enfin, un volet de l’exposition, intitulé « Un nouveau départ mais pas une année zéro », est consacré à la lenteur avec laquelle, à partir de 1945, le travail de mémoire sur ce point particulier se mettait en place.


  • La police allemande : une histoire sombre désormais connue
Entre 1933 et 1945, non seulement la Gestapo (police secrète d’État), mais aussi l’Ordnungspolizei (police régulière en uniforme, chargée du maintien de l’ordre) et la Kriminalpolizei (police criminelle) ont joué un rôle majeur dans la mise en oeuvre du programme nazi. 

Humiliation publique de Christine Neemann et Julius Wolff - avec un écriteau autour du cou « Je suis un profanateur de la race », à Norden le 22 juillet 1935



Dès 1933, les policiers ont tout fait pour appliquer par la force l’idéologie nazie, ou ce que beaucoup d’entre eux tenaient pour telle.  La photographie proposée ci-dessus (humiliation publique, Norden - frise orientale -, juillet 1935) témoigne de cet empressement de la police allemande à devancer les ordres. A la date de cette photographie, les lois de Nuremberg ne sont pas votées...  Pourtant, la police soutient - et participe - à une humiliation publique de "profanateurs de la race". Flanqué de deux agents de police, l'homme porte au cou un écriteau "Je suis un profanateur de la race", sa femme, tête basse, est aussi exposée aux badauds. En septembre 1935, la "loi sur la protection du sang allemand et de l'honneur allemand" (lois de Nuremberg) interdit le mariage et même les relations extraconjugales entre Juifs et citoyens de sans allemand. Des sanctions pénales sont prévues pour les contrevenants : la "Rassenschande" ("honte raciale" ou crime de race) est passible de 15 ans d'emprisonnement.
Marseille, 1943, bataillon de police sécurisant l'acheminement de Juifs vers les camps
Lorsque la guerre éclate, des « bataillons de police » composés de fonctionnaires et de réservistes de la police sont créés. 125 bataillons de cinq à six cents hommes sont chargés de maintenir l’ordre dans les pays occupés. Ils forment 25 à 30 % des effectifs totaux de l’Ordnungspolizei. En Europe centrale et orientale, ils participent activement au massacre des Juifs et d’autres catégories de population, et notamment à l’extermination de tout un village tchèque, Lidice. De source judiciaire, 520 000 morts au moins leur sont imputables ; le nombre réel de leurs victimes est probablement plus proche du million.
En outre, à partir de 1941, l’Ordnungspolizei a été investie d’une nouvelle mission : la surveillance des trains de déportés en route vers les camps d’extermination. Une mission qu’elle a assurée en toute connaissance de cause. 
  • Une histoire qui s'est faite lentement...
Pendant une bonne quarantaine d’années, de nombreux Allemands sont restés persuadés qu’entre 1933 et 1945, la police remplissait avant tout ses missions habituelles. Ce qu’elle a effectivement fait, mais elle était aussi l’un des bras armés du régime nazi, comme le montrent sans ambiguïté les travaux récents.
Dans les années 1990, les Allemands accélèrent le travail de mémoire sur ce sombre chapitre de l’histoire de la police allemande, le poursuivant assidûment à l’échelle locale et régionale. En 2008, les ministres de l’intérieur des Länder et du gouvernement fédéral décident de lancer le projet « La police de l’État nazi », pour faire la synthèse de tous ces travaux. Il se compose de trois volets : l' exposition à l’intention du grand public, présentée au Musée historique de Berlin du 1er au 31 juillet, intitulée "Ordre et Extermination" ; la production de matériels éducatifs sur le thème « La police dans l’Allemagne nazie », et enfin l’élaboration d’un module de présentation destiné aux expositions permanentes des écoles de la police régionale et de la police fédérale. Le projet est placé sous l’autorité de l’Académie allemande de police de Münster, l’exposition est organisée en coopération avec le Musée historique de Berlin.

Pour en savoir plus, voir les extraits de l'émission consacrée à la police allemande, ARTE, (Allemagne, 2010, 52mn) RBB/ARTE
Réalisateur: Frank Gutermuth, Holger Hillesheim, Sebastian Kuhn, Wolfgang Schoen

Sources
http://www.arte.tv/fr/731350,CmC=3782002.html
Christopher R. BROWNING, Des hommes ordinaires. Le 101e bataillon de réserve de la police allemande et la solution finale en Pologne, traduit de l'anglais par Elie Barnavi, préface de Pierre Vidal-Naquet, Paris, Les Belles Lettres, Collection Histoire, 1994, 284 p.
Reinhard Rürup, Topographie de la terreur : Gestapo, SS et Office central de sécurité du Reich sur le "terrain Prinz-Albrecht", Documentation, Berlin, Verlag Willmuth Arenhövel, 2002.

jeudi 26 mai 2011

Les tondues à la Libération

l'histgeobox: 234. Brassens: "la tondue". (1964): "Les tontes de femmes à la Libération sont longtemps restées un angle mort de la recherche historique. Jusqu'au début des années 1990, les ou..."

vendredi 20 mai 2011

le massacre de Nankin au cinéma

John Rabe, l'histoire d'un nazi devenu le "juste de Nankin"...
Un film allemand de Florian Gallenberger, sorti en France avril 2011
L'HISTOIRE : 1937. Installé à Nankin, John Rabe est à la tête de l’antenne chinoise de la firme Siemens. Débonnaire et manichéen, il croit fermement à sa mission et au parti nazi. Lorsque les forces impériales japonaises encerclent la ville, le manageur allemand ne se doute pas que les alliés du troisième Reich ont choisi cette bataille pour démontrer leur puissance, en point d’orgue de leur guerre de conquête. Elles s’apprêtent à massacrer sciemment la population de Nankin. Déjà ébranlé par sa mutation soudaine à Berlin et le démantèlement des infrastructures Siemens en Chine, le travail de toute une vie, il choisit peu à peu la désobéissance et tente avec quelques membres de la communauté étrangère de sauver le plus grand nombre de vies
Allemagne, Chine, Japon, aux prises avec leur passé...
Le massacre de Nankin, longtemps occulté, commence à apparaître dans diverses œuvres littéraires jusqu'à son illustration frontale l'an dernier par Lu Chuan ( réalisateur chinois) dans l'effroyable City of Life and Death. Aujourd'hui c'est un autre peuple meurtri qui fait un geste de paix avec son passé. L'Allemagne célèbre John Rabe, un de ses plus grands héros, un héros appartenant au mouvement nazi et qui sauva quelques 250000 chinois à Nankin justement. Un sujet délicat pour Florian Gallenberger, courageux de l'aborder pour son second film. Un nazi qui sauve des milliers de personnes, d'abord pour maintenir son entreprise en activité avant d'en donner les rênes à son successeur, puis par pure humanité. 


Le massacre de Nankin, point d'orgue de la guerre sino-japonaise

Le massacre de Nankin est perpétré pendant la guerre sino-japonaise commencée en 1931. Au Japon, l'empereur Hiro-Hito a laissé les généraux prendre la réalité du pouvoir. La Chine est quant à elle déstabilisée par la lutte que se livrent les nationalistes ( menés par Tchang Kaï Tchek) et les communistes ( menés par Mao). C'est dans ce contexte que le Japon décide l'invasion de la province chinoise de Mandchourie. En juillet 1937, le Japon - qui a alors le soutien de l'Allemagne hitlérienne et bénéficie de l'attentisme des occidentaux - se lance dans la conquête de toute la Chine. En quelques mois, les Japonais occupent près d'un million de kilomètres carrés peuplés de 60 millions d'habitants. Ils mettent en oeuvre une politique de terreur systématique pour tenter d'abattre la résistance intérieure. Les massacres deviennent la règle. Ils atteignent leur maximum avec la prise de Nanjing (Nankin en graphie ancienne), ancienne capitale de la Chine et siège éphémère du gouvernement de Tchang Kaï-chek. 
Le 10 décembre, les Japonais ont envoyé un ultimatum aux troupes qui défendent la ville. Celle-ci est abandonnée  à son sort par les troupes de Tchang Kaï-Tchek. Ceux qui tentent de quitter la ville ( soldats, civils) en traversant le fleuve sont tués par la flotte japonaise. Enfin, après un pilonnage de 3 jours, les Japonais entrent dans la ville le 13 décembre 1937. Confiants, les soldats chinois se laissent désarmer et se rendent par unités entières. Ceux qui ne se rendent pas spontanément sont traqués. Les Japonais arrêtent dans la rue tous les hommes en âge de combattre et suspects d'avoir porté une arme ou un casque. Le commandement nippon craint alors d'être submergé par la grande masse des prisonniers dans une ville a priori hostile. Il ordonne le massacre des prisonniers, contre toutes les lois de la guerre. Celui-ci s'opère froidement, à la baïonnette, au sabre ou plus souvent encore à la mitrailleuse, sur des malheureux liés entre eux par groupes d'une douzaine. On évalue entre 30.000 et 60.000 le nombre de soldats tués de la sorte dans les premiers jours. Puis vient le massacre des fonctionnaires ; enfin, la terreur frappe tous les habitants de la ville dans les semaines qui suivent. Des femmes sont enlevées et victimes de viols collectifs.  Au total, les victimes du massacre de Nankin sont estimées à plus de 100 000 ( les autorités chinoises avancent un chiffre plus élevé, entre 200 et 300 000). 


Sources :
Nicolas GILLI, critique du film "John Rabe" proposée sur le site Excessif. com : http://www.excessif.com/cinema/critiques/critique-john-rabe-6408215-760.html#
http://www.herodote.net/histoire/evenement.php?jour=19371213 ( article : 13 décembre 1937, les Japonais s'emparent de Nankin)

mercredi 18 mai 2011

Le commerce mondial des armes : qui achète? qui vend?


  • Quelques vendeurs tiennent un marché lucratif
Les principaux exportateurs d'armes sont les Etats-Unis (30%), la Russie (23%), l'Allemagne (11%), la France (7%) et la Grande-Bretagne (4%), selon l'Institut de recherche pour la Paix de Stockholm (SIPRI). 
Etats-Unis et Russie, les héritiers du monde bipolaire de la Guerre froide, fournissent donc à eux seuls la moitié des armes conventionnelles vendues dans le monde. 
Le rôle des Etats-Unis, s'il reste majeur, est néanmoins en net retrait, comme le montre ce graphique représentant l'évolution des exportations d'armes par les Etats-Unis depuis 1960. Les Etats-Unis représentaient en effet 62% des ventes d'armes en 1960, contre 31% aujourd'hui. 
Exportations d'armes des Etats-Unis, 1960-2008, source : Perspective Monde


Définition  Il s'agit ici des transferts d'armements militaires sous différentes formes (vente, aide, cadeaux), ainsi que ceux effectués avec des licences manufacturières. Cette statistique regroupe des armes conventionnelles majeures telles que les avions, les véhicules blindés, l'artillerie, les systèmes de radar, etc. La somme totale est évaluée en dollars américains de 1990.


Le poids de la Russie est lui aussi en léger recul. Il est passé de 31% pour les années 2001-2005 à 23% aujourd'hui. La Russie effectue ses livraisons d'armes à destination de la Chine (43% de ses ventes dans les années 2001-2005), de l'Inde (25%), mais aussi de zones fortement instables et/ou conflictuelles (Soudan, Ethiopie, Irak, Iran...).

Olivier Munoz, le commerce des armes dans le monde
Le cercle des exportateurs tend à s'élargir, comme le montre cette carte de l'évolution des exportations des 25 premiers vendeurs d'armes dans le monde. Globalement, les pays exportateurs d'armes appartiennent aux pays du Nord ou aux puissances émergentes. 

  • Les pays asiatiques, de gros acheteurs : un signe de la montée en puissance de l'aire de puissance asiatique?


Pour la période 2006-2010, les pays asiatiques sont leaders du classement de SIPRI: l'Inde arrive en première position pour les livraisons d'armes (9% des livraisons mondiales), la Chine est deuxième (6%), devant la Corée du Sud, le Pakistan.
La Chine dominait le classement précédent pour 2005-2009 où elle représentait 9% des importations globales d'armes. 
En 2004, les dépenses d'armement avaient représenté près de 12 milliards de $ pour la Chine, 9 milliards pour l'Inde. 
Les régions principales importatrices d'armes sont l'Asie et l'Océanie (43% des importations globales). Viennent ensuite l'Europe (21%), le Proche-Orient (17%), l'Amérique (12%) et l'Afrique (7%).
  • L'Inde, premier importateur mondial
Inde, parade militaire. 
L'Inde se trouve donc en tête du classement des plus gros importateurs d'armes conventionnelles et de matériels de guerre pour 2006-2010. 
Selon le SIPRI, les importations d'armes indiennes ont constitué 9% des livraisons mondiales d'armements entre 2006 et 2010. La Russie est le plus grand exportateur d'armes vers l'Inde (82% des importations indiennes), précisent les experts de SIPRI.
La croissance des importations d'armes conventionnelles indiennes est dictée par plusieurs facteurs dont "la concurrence avec le Pakistan et la Chine et les problèmes de la sécurité intérieure", a déclaré un expert de SIPRI, Siemon Wezeman.
Sources : 
http://fr.rian.ru/world/20110314/188858216.html
http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/tend/USA/fr/MS.MIL.XPRT.KD.html
http://geo-phile.net/spip.php?article148
Site du centre d'études stratégiques et aérospatiales :http://www.cesa.air.defense.gouv.fr/IMG/pdf/Les_ventes_d_armes_conventionnelles.pdf

Commerce mondial : les grandes puissances exportatrices 2010

Après une chute de 12% en 2009, le commerce mondial a rebondi de 14,5% en 2010, selon l'OMC. Cette expansion annuelle est la plus forte enregistrée depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Quelles puissances ont le plus profité de ce rebond historique? 


Rang


Pays


Croissance des exportations 2009-2010


Valeur des exportations 2010


Poids dans le commerce mondial (exportations)
1
Chine
+ 31%
1578 milliards $
10%
2
Etats-Unis
+ 21%
1278 milliards $
8,4%
3
Allemagne
+ 13%
1269 milliards $
8,3%
4
Japon
+ 33%
770 milliards $
5%
5
Pays-bas
+ 15%
572 milliards $
3,8%
6
France
+ 13%
521 milliards $
3,4%
7
Corée du Sud
+ 28%
466 milliards $
3,1%
8
Italie
+10%
448 milliards $
2,9%
9
Belgique
+ 11%
411 milliards $
2,7%
10
Royaume Uni
+ 15%
405 milliards $
2,6%



Des conteneurs en partance dans le port chinois de Tianjin
Comme le montre ce tableau des 10 premières puissances exportatrices mondiales en 2010, la Chine est la principale bénéficiaire et l'un des acteurs majeurs de cette reprise du commerce mondial. Plus généralement, c'est l'aire de puissance asiatique ou aire de puissance de l'Asie orientale ( Chine, Japon, Corée du sud) qui joue désormais un rôle majeur dans le commerce mondial. Les pays de cette zone enregistrent en effet les plus fortes croissances. 

Des VW "préparées" pour le départ...
Les pays de l'Union européenne présents dans ce classement - Allemagne, Pays-Bas, France, Belgique, Italie, Royaume-Uni - pèsent lourd : si on les considère ensemble, ils confèrent à l'Union européenne la première place dans les échanges mondiaux (15%) devant la Chine (10%). La notion d'aire de puissance - une région dont le poids économique, les capacités d'innovation technologique... autorisent une influence mondiale - trouve là encore une illustration.  




Boeing 777, l'un des fleurons de la haute technologie américaine
Le classement montre aussi la permanence du rôle joué par les Etats-Unis dans le commerce international.
La mémorisation des données de ce tableau peut s'appuyer sur le regroupement en trois ensembles : les puissances dont les exportations excèdent 1 000 milliards de $ (Chine, Etats-Unis, Allemagne); celles dont les exportations sont comprises entre 500 et 1000 milliards de $ (Japon, Pays-Bas, France), celles enfin dont les exportations sont inférieures à 500 milliards de $. 
Source
L'expansion, Le nouveau palmarès des pays exportateurs, 7/04/2011, http://lexpansion.lexpress.fr/economie/le-nouveau-palmares-des-pays-exportateurs_252033.html?p=3#main

mardi 17 mai 2011

2009, la France réintègre le commandement intégré de l'OTAN


La France réintègre l’OTAN et Sarkozy ferme la parenthèse gaulliste

Jean-Noël Guenot,
La Tribune de Genève, 12 mars 2009, 





«Ceux qui prétendent que notre indépendance serait en question trompent les Français!».  
Sur ce ton guerrier lancé hier à l’Ecole militaire de Paris, Nicolas Sarkozy a annoncé le retour de la France au sein du commandement intégré de l’OTAN. Il ferme ainsi la parenthèse ouverte en 1966 par le général de Gaulle. Certes en retirant la République des structures militaires de l’Alliance atlantique, le général-président avait pris garde de ne pas rompre entièrement avec l’OTAN. De plus, ces dernières années, la France a réintégré la plupart des instances de l’Alliance. Il ne restait plus qu’à reprendre place sur les sièges du commandement militaire. Ce sera donc chose faite.
«Nous devons être là où s’élaborent les décisions et les normes, plutôt qu’attendre dehors qu’on nous les notifie», argumente le président français, qui souligne à gros traits: «Mais nous conserverons notre dissuasion atomique indépendante. La décision nucléaire ne se partage pas.» 
L’apostrophe de Nicolas Sarkozy concernant l’indépendance de la France ne vise pas tellement les opposants habituels – les socialistes ou le MoDem de François Bayrou – que le propre parti du président, l’UMP. 
Si la majeure partie des députés de la droite approuve la réintégration complète dans l’OTAN, plusieurs «poids lourds» de l’UMP s’y opposent, de même que l’aile restée fidèle au gaullisme pur sucre. Parmi ces opposants, deux anciens chefs de gouvernement: Dominique de Villepin, le plus virulent, et Alain Juppé, plus modéré dans ses propos mais tout aussi méfiant quant aux conséquences de ce changement de cap. Dans un blog des partisans de Villepin, le député-maire UMP de Vannes François Goulard n’a pas ménagé ses critiques contre cette réintégration: «La France risque d’apparaître comme systématiquement alignée, alors qu’on a besoin qu’elle s’exprime librement, comme elle l’a fait avec l’Irak.» Pour clore le bec des députés restés fidèles au gaullisme traditionnel, Nicolas Sarkozy a demandé à son premier ministre, François Fillon, d’engager la responsabilité du gouvernement mardi prochain. Ce jour-là, les députés devront donner leur feu vert au retour, plein et entier, de la France dans l’OTAN. Si les parlementaires refusent cette réintégration, ils feront également tomber le gouvernement. Ce qui contraint les députés UMP antiatlantistes – une quarantaine au moins – à ne pas voter avec l’opposition. «C’est une mauvaise manière qui empêche les députés de s’exprimer», s’insurge François Goulard, qui ne prendra pas part au vote. Le feu vert de l’Assemblée nationale ne fait donc aucun doute. Mais cette question laissera de douloureuses cicatrices à l’UMP.

Défense nationale et alliance à l’ouest, brève chronologie : 
«Garder les Américains à l’intérieur, les Russes à l’extérieur et les Allemands  sous tutelle», tel est l’esprit  qui prévaut à la création de l’Organisation de l’Atlantique Nord (OTAN), selon  les mots de son premier secrétaire général Lord Hastings Lionel Ismay. 
 4 avril 1949
La France fait partie des  cinq pays européens parmi  les douze fondateurs de  l’OTAN. 
30 août 1954 
L’Assemblée nationale rejette le traité de la Communauté européenne de défense prévoyant la création d’une armée européenne sous tutelle supranationale. 
 7 mars 1966 
Dans une lettre au président américain Lyndon Johnson,  le général de Gaulle, prend  ses distances, tout en restant dans l’OTAN. La France se retire du commandement intégré et ferme les bases américaines et canadiennes sur son sol. «La France se propose de recouvrer sur son territoire l’entier exercice  de sa souveraineté, entamé par la présence permanente d’éléments militaires alliés ou par l’utilisation habituelle qui est faite de son ciel.» 
 5 décembre 1995 
La France annonce qu’elle reprend sa place au comité militaire, où elle n’avait plus qu’un rang d’observateur.

Source
L'intégralité de ce message reprend l'article publié dans La tribune de Genève, 12 mars 2009.