Pages

Au fil des questions au programme d'histoire-géographie des classes de lycée. Des commentaires, exercices, rappels, ...

dimanche 29 mai 2011

L'Allemagne et son passé nazi


Ordnung und Vernichtung  (Ordre et extermination), 

A Berlin, une exposition intitulée "Ordre et extermination" est consacrée au rôle de la police allemande. Elle témoigne non seulement de l'avancée des connaissances historiques relatives au IIIe Reich et aux instruments de la terreur, mais aussi de la volonté des Allemands d'affronter leur passé. 
L’exposition berlinoise porte sur le rôle de la police sous le IIIe Reich, bras armé du régime en Allemagne même, mais aussi et surtout exécutante de la « solution finale » en Europe centrale et orientale. Des biographies de suiveurs mais aussi d’objecteurs montrent qu’il était tout à fait possible de « résister ». Enfin, un volet de l’exposition, intitulé « Un nouveau départ mais pas une année zéro », est consacré à la lenteur avec laquelle, à partir de 1945, le travail de mémoire sur ce point particulier se mettait en place.


  • La police allemande : une histoire sombre désormais connue
Entre 1933 et 1945, non seulement la Gestapo (police secrète d’État), mais aussi l’Ordnungspolizei (police régulière en uniforme, chargée du maintien de l’ordre) et la Kriminalpolizei (police criminelle) ont joué un rôle majeur dans la mise en oeuvre du programme nazi. 

Humiliation publique de Christine Neemann et Julius Wolff - avec un écriteau autour du cou « Je suis un profanateur de la race », à Norden le 22 juillet 1935



Dès 1933, les policiers ont tout fait pour appliquer par la force l’idéologie nazie, ou ce que beaucoup d’entre eux tenaient pour telle.  La photographie proposée ci-dessus (humiliation publique, Norden - frise orientale -, juillet 1935) témoigne de cet empressement de la police allemande à devancer les ordres. A la date de cette photographie, les lois de Nuremberg ne sont pas votées...  Pourtant, la police soutient - et participe - à une humiliation publique de "profanateurs de la race". Flanqué de deux agents de police, l'homme porte au cou un écriteau "Je suis un profanateur de la race", sa femme, tête basse, est aussi exposée aux badauds. En septembre 1935, la "loi sur la protection du sang allemand et de l'honneur allemand" (lois de Nuremberg) interdit le mariage et même les relations extraconjugales entre Juifs et citoyens de sans allemand. Des sanctions pénales sont prévues pour les contrevenants : la "Rassenschande" ("honte raciale" ou crime de race) est passible de 15 ans d'emprisonnement.
Marseille, 1943, bataillon de police sécurisant l'acheminement de Juifs vers les camps
Lorsque la guerre éclate, des « bataillons de police » composés de fonctionnaires et de réservistes de la police sont créés. 125 bataillons de cinq à six cents hommes sont chargés de maintenir l’ordre dans les pays occupés. Ils forment 25 à 30 % des effectifs totaux de l’Ordnungspolizei. En Europe centrale et orientale, ils participent activement au massacre des Juifs et d’autres catégories de population, et notamment à l’extermination de tout un village tchèque, Lidice. De source judiciaire, 520 000 morts au moins leur sont imputables ; le nombre réel de leurs victimes est probablement plus proche du million.
En outre, à partir de 1941, l’Ordnungspolizei a été investie d’une nouvelle mission : la surveillance des trains de déportés en route vers les camps d’extermination. Une mission qu’elle a assurée en toute connaissance de cause. 
  • Une histoire qui s'est faite lentement...
Pendant une bonne quarantaine d’années, de nombreux Allemands sont restés persuadés qu’entre 1933 et 1945, la police remplissait avant tout ses missions habituelles. Ce qu’elle a effectivement fait, mais elle était aussi l’un des bras armés du régime nazi, comme le montrent sans ambiguïté les travaux récents.
Dans les années 1990, les Allemands accélèrent le travail de mémoire sur ce sombre chapitre de l’histoire de la police allemande, le poursuivant assidûment à l’échelle locale et régionale. En 2008, les ministres de l’intérieur des Länder et du gouvernement fédéral décident de lancer le projet « La police de l’État nazi », pour faire la synthèse de tous ces travaux. Il se compose de trois volets : l' exposition à l’intention du grand public, présentée au Musée historique de Berlin du 1er au 31 juillet, intitulée "Ordre et Extermination" ; la production de matériels éducatifs sur le thème « La police dans l’Allemagne nazie », et enfin l’élaboration d’un module de présentation destiné aux expositions permanentes des écoles de la police régionale et de la police fédérale. Le projet est placé sous l’autorité de l’Académie allemande de police de Münster, l’exposition est organisée en coopération avec le Musée historique de Berlin.

Pour en savoir plus, voir les extraits de l'émission consacrée à la police allemande, ARTE, (Allemagne, 2010, 52mn) RBB/ARTE
Réalisateur: Frank Gutermuth, Holger Hillesheim, Sebastian Kuhn, Wolfgang Schoen

Sources
http://www.arte.tv/fr/731350,CmC=3782002.html
Christopher R. BROWNING, Des hommes ordinaires. Le 101e bataillon de réserve de la police allemande et la solution finale en Pologne, traduit de l'anglais par Elie Barnavi, préface de Pierre Vidal-Naquet, Paris, Les Belles Lettres, Collection Histoire, 1994, 284 p.
Reinhard Rürup, Topographie de la terreur : Gestapo, SS et Office central de sécurité du Reich sur le "terrain Prinz-Albrecht", Documentation, Berlin, Verlag Willmuth Arenhövel, 2002.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire