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vendredi 9 septembre 2011

1945, un tournant

L'année 1945 marque un tournant dans le siècle. C'est la fin de la Seconde Guerre mondiale, dont le bilan est tellement lourd qu'il génère autant l'espoir : espoir d'un monde nouveau, fondé sur la démocratie, l'égalité entre les peuples, la justice, le respect de la personne humaine... que la crainte : comment panser les plaies laissées par le conflit?
C'est ce qu'expriment de nombreuses affiches et caricatures.
L'heure est à la célébration de la victoire, et c'est elle que met en avant cette affiche soviétique : "La bête est morte". L'Allemagne y est représentée sous les traits d'un animal sanguinaire, une bête féroce enfin tombée sous les coups conjugués ( plusieurs couteaux la poignardent ) des puissances alliées, symbolisées par leurs drapeaux : le drapeau britannique, le drapeau américain, le drapeau soviétique. 
La composition de cette affiche donne le sentiment que la Grande Alliance (Etats-Unis, Grande Bretagne, URSS), qui a terrassé le cauchemar hitlérien - représenté tant par la bête féroce que par les ruines -, peut seule tracer la voie vers l'avenir. 
Affiche éditée en 1945 pour la création de l'ONU







L'idée d'une union nécessaire à la préservation de la paix porte aussi les affiches célébrant la création de l'Organisation des Nations-Unies. Sur cette affiche éditée en 1945, l'union des peuples est représentée par les mains de couleurs différentes comme par l'ensemble des drapeaux des 51 pays fondateurs. Cette union est le creuset qui permettra la naissance d'un monde nouveau : l'enfant, qui réconcilie tous les peuples du monde, symbolise la paix.

Dessin américain de D.R. Fitzpatrick, 1945
Espoir, la paix est aussi nécessité. La victoire n'a de sens que si elle permet la création d'un monde meilleur. C'est ce que rappelle un dessin de D.R.Fitzpatrick relatif à l'ONU. Ici, l'accent est davantage mis sur le sacrifice enduré : l'ombre portée des combattants morts pèse sur le présent. La nouvelle organisation représente l'espoir fragile ( c'est un esquif en pleine mer) que le sacrifice n'aura pas été vain. La comparaison entre les deux documents est saisissante : la première - dont la composition oppose nuit et lumière, néant et renaissance - est toute en verticalité, en élévation. Le monde nouveau est en gestation. Dans la seconde par contre, ce monde nouveau - désincarné - subit le poids de la guerre. Les hommes représentés sont morts. Ce sont eux dont le souvenir exige un renouveau. 


Cette ambivalence de 1945 est reprise dans cette caricature allemande (dessin de Leffe). Elle évoque un nécessaire passage de relais entre le vieux monde blessé par le conflit et le monde à venir. La frontière entre les deux mondes est nette : elle est marquée d'un panneau "PAX". 
Mais le passage de relais est empoisonné par la nature de celui-ci : sur le relaisporté par "l'homme de 1945" est inscrit : "AtomEnergie". Le message est clair. Le principal fardeau sera celui de l'arme nucléaire, que les Etats-Unis sont alors seuls à détenir, et dont l'usage - à Hiroshima puis Nagasaki en août 1945- a provoqué un choc des consciences. 
"La civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie. Il va falloir choisir, dans un avenir plus ou moins proche, entre le suicide collectif ou l'utilisation intelligente des conquêtes scientifiques. (...)
Déjà, on ne respirait pas facilement dans un monde torturé. Voici qu'une angoisse nouvelle nous est proposée, qui a toutes les chances d'être définitive"
Camus, Combat, 8 août 1945

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